• Jean-Pierre Le Goff dénonce le gauchisme culturel

    "Ce qu'on appelle l'affaire Leonarda a fait apparaître une nouvelle fois l'opposition qui existe depuis longtemps entre une gauche politique et sociale et un gauchisme sociétal qui s'est approprié le magistère de la morale. Ce dernier accentue la coupure de la gauche avec les couches populaires et mine sa crédibilité."

    "Malgré leurs critiques du libre-échange mondialisé, la gauche et l'extrême gauche n'ont pas réussi à reconquérir une partie de l'électorat populaire parce que leur conversion au modernisme est largement apparue comme un rejet ou l'abandon de la nation, de son héritage culturel et politique qui demeurent des éléments essentiels de l'existence collective d'un peuple et de la démocratie."

     

     

    * * *

     

    Verbatim :

    "La gauche, orpheline du prolétariat, a repris à son compte l'héritage de mai 68, en substitut à la crise de sa doctrine (…).

    Depuis les années 80, la gauche moraliste l'a emporté sur la gauche sociale. Elle a cadenassé le débat intellectuel et les débats refoulés reviennent par la fenêtre. (...)

    Il faut s'interroger sur un certain nombre d'associations qui ont une fonction : surveiller les paroles et porter plainte. Je ne dis pas qu'il ne faut pas combattre, mais il faut aussi laisser la société polémiquer, parfois durement, sans en appeler sans arrêt à la loi. (…)

    [La stratégie de la droite] est de lancer le stimuli dans lequel la gauche bête moralisante va s'engouffrer, ce qui va contribuer à creuser le fossé avec les classes populaires. Jusqu'à présent, les hameçons lancés par la droite ont globalement marché. (...)

    Le libéralisme intellectuel à gauche me semble problématique."

    Sur France culture, Répliques

     

    Briser l'influence du gauchisme culturel, Par Jean-Pierre Le Goff - Octobre 2013. Extrait

    "Ce qu'on appelle l'affaire Leonarda a fait apparaître une nouvelle fois l'opposition qui existe depuis longtemps entre une gauche politique et sociale et un gauchisme sociétal qui s'est approprié le magistère de la morale. Ce dernier accentue la coupure de la gauche avec les couches populaires et mine sa crédibilité. En refusant de rompre clairement avec ce courant, la gauche au pouvoir récolte les fruits amers de ce qu'elle a semé.

    Des représentants du gauchisme sociétal appellent les lycéens à reprendre la lutte, multiplient les leçons de morale envers le gouvernement et un peuple considéré comme des "beaufs" fascisants. Par un paradoxe historique et la grâce électorale du Parti socialiste, certains, toujours prompts à jouer la société contre l'Etat, à considérer l'idée de nation comme xénophobe et ringarde, se retrouvent ministres et représentants de la nation. De nouveaux moralistes au pouvoir entendent éradiquer les mauvaises pensées et comportements en changeant les mentalités par la loi. Ils sont relayés par des militants et des associations qui pratiquent la délation, le lynchage médiatique et multiplient les plaintes en justice. La France vit dans un climat délétère où l'on n'en finit pas de remettre en scène les schémas du passé : "lutter contre le fascisme" toujours renaissant, "faire payer les riches" en se présentant comme les porte-parole attitrés des pauvres, des exclus et des opprimés de tous les pays du monde, en développant un chantage sentimental et victimaire contre la raison.

    La confiance dans les rapports sociaux, la liberté d'opinion et le débat intellectuel s'en trouvent profondément altérés. Le chômage de masse, l'érosion des anciennes solidarités collectives et les déstructurations identitaires qui touchent particulièrement les couches populaires paraissent hors champ de ce combat idéologique entre le camp du progrès revisité et l'éternelle réaction."

    Dans Le Monde

     

    Fiasco politique des élites soixante-huitardes, Par Jean-Pierre Le Goff, sociologue. Mai 2013. Extrait

    "Considère-t-on que les questions sociétales constituent désormais le nouveau marqueur identitaire de la gauche, et ce à un moment où la politique économique menée est difficilement assumée, ou encore que la gauche sociale est désormais inséparable de la gauche sociétale ? Si oui, il faut admettre qu'un seuil a été franchi : la question sociale, qui a façonné l'identité historique de la gauche, n'occupe plus la place centrale.

    (...) Quand on ne cherche plus à convaincre, mais à gagner dans un débat dont on a d'emblée délimité les contours légitimes, quand le réflexe de défense identitaire l'emporte, il y a de quoi s'inquiéter sur l'avenir d'une gauche qui ne s'aperçoit même plus qu'elle exacerbe une bonne partie de son électorat et de la population.

    L'extrême droite espère bien en tirer profit en soufflant sur les braises, mais, à vrai dire, elle n'a pas grand-chose à faire : le modernisme à tous crins et le sectarisme d'une bonne partie de la gauche lui facilitent la tâche."

    Dans Le Monde

     

    Quand le Front national prospère sur l'aveuglement d'une gauche bien-pensante, Par Jean-Pierre Le Goff, sociologue. Extraits.

    "La dégradation des conditions économiques et sociales n'explique pas tout : pourquoi le succès du Front national et non celui de l'extrême gauche, qui n'a cessé de critiquer le capitalisme et la "dictature des marchés", bien avant que Marine Le Pen se mette à dénoncer l'"hypercapitalisme", l'"hyperlibéralisme", l'"hyperclasse mondialisée"... ?

    La fracture que le Front national exploite n'est pas seulement économique et sociale, elle est tout autant politique et culturelle. La mondialisation économique s'est accompagnée de bouleversements culturels qui ont désorienté une bonne partie de la société. (...) La gauche a du mal à affronter cette réalité parce qu'elle s'est voulue à l'avant-garde dans le domaine des moeurs et de la culture. Elle a mêlé en un seul bloc question sociale et modernisme culturel, désorientant ainsi une bonne partie des citoyens qui n'adhèrent pas à ce dernier.

    Malgré leurs critiques du libre-échange mondialisé, la gauche et l'extrême gauche n'ont pas réussi à reconquérir une partie de l'électorat populaire parce que leur conversion au modernisme est largement apparue comme un rejet ou l'abandon de la nation, de son héritage culturel et politique qui demeurent des éléments essentiels de l'existence collective d'un peuple et de la démocratie.

    (...) La façon dont s'est construite l'Union européenne est l'un des exemples les plus frappants, quand des politiques se montrent incapables de tenir un discours clair et cohérent sur l'articulation de la nation et de l'Union européenne. C'est toute une opposition sommaire qui s'est mise en place, enfermant le débat public dans un faux choix entre un repli nationaliste et xénophobe et une ouverture culturelle qui tend à se représenter le monde comme une vaste société que la morale, les droits de l'homme et l'écologie suffiraient à réguler. La question de l'immigration n'échappe pas à cette représentation angélique qui dénie la spécificité de notre culture et du modèle français républicain d'intégration. (...)

    Le Monde


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  • Commentaires

    1
    BA
    Jeudi 24 Octobre 2013 à 22:37

    Chômage en septembre 2013 : catégories A, B, C, D, E :

     

    France métropolitaine :

     

    5 473 000 inscrits à Pôle Emploi.

     

    France entière (y compris l'outre-mer) :

     

    5 795 300 inscrits à Pôle Emploi.

     

    Variation sur un mois : + 1,4 %.

     

    Variation sur un an : + 6,8 %.

     

    http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/PI-Mensuelle_JMT751.pdf

     

    Vous vous rappelez toutes les belles promesses au moment du référendum sur le traité de Maastricht ?

     

    -              « Si le traité était en application, finalement la Communauté européenne connaîtrait une croissance économique plus forte, donc un emploi amélioré. » (Valéry Giscard d’Estaing, 30 juillet 1992, RTL)

     

    -              « L’Europe est la réponse d’avenir à la question du chômage. En s’appuyant sur un marché de 340 millions de consommateurs, le plus grand du monde ; sur une monnaie unique, la plus forte du monde ; sur un système de sécurité sociale, le plus protecteur du monde, les entreprises pourront se développer et créer des emplois. » (Michel Sapin, 2 août 1992, Le Journal du Dimanche)

     

    -              « Maastricht constitue les trois clefs de l’avenir : la monnaie unique, ce sera moins de chômeurs et plus de prospérité ; la politique étrangère commune, ce sera moins d’impuissance et plus de sécurité ; et la citoyenneté, ce sera moins de bureaucratie et plus de démocratie. » (Michel Rocard, 27 août 1992, Ouest-France)

     

    -              « Les droits sociaux resteront les mêmes – on conservera la Sécurité sociale –, l’Europe va tirer le progrès vers le haut. » (Pierre Bérégovoy, 30 août 1992, Antenne 2)

     

    -              « Pour la France, l’Union Economique et Monétaire, c’est la voie royale pour lutter contre le chômage. » (Michel Sapin, 11 septembre 1992, France Inter)

     

    -              « C’est principalement peut-être sur l’Europe sociale qu’on entend un certain nombre de contrevérités. Et ceux qui ont le plus à gagner de l’Europe sociale, notamment les ouvriers et les employés, sont peut-être les plus inquiets sur ces contrevérités. Comment peut-on dire que l’Europe sera moins sociale demain qu’aujourd’hui ? Alors que ce sera plus d’emplois, plus de protection sociale et moins d’exclusion. » (Martine Aubry, 12 septembre 1992, discours à Béthune)

     

     

    -              « Si aujourd’hui la banque centrale européenne existait, il est clair que les taux d’intérêt seraient moins élevés en Europe et donc que le chômage y serait moins grave. » (Jean Boissonnat, 15 septembre 1992, La Croix)

      • salvatore Cutugno
        Mardi 3 Mai 2016 à 11:33

        Sauf que... le traité de Maastricht, qui prévoyait en fait une convergence économique et fiscale en Europe, n'a, en fait pas été appliqué. Jospin et consors ont pratiqué un élargissement de l'Europe à tous les vents, au lieu de son approfondissement, et signé de multiples pactes dérogatoires....

    2
    Vendredi 25 Octobre 2013 à 22:16

    Voilà un point de vue intéressant mais qui ne me convainc pas complètement. Je comprends bien cet agacement devant les leçons de morale administrées à coups de pied au cul de la part de troubles et mous qui se pensent purs et durs.

    Mais je ne puis opposer les Leonarda à "mes" Tsiganes qui vivent dans mon département depuis des générations. Et vivent bien souvent dans une pauvreté qui confine à la misère. Et restent l'objet de tracas sans fin. Et sont victimes d'une législation qui reste aujourd'hui encore discriminatoire. 

    Ensuite je ne parviens pas à trier entre de bons et de mauvais pauvres. Mon pote Juan, gitan de lointaine origine espagnole, en a bavé dans les entreprises de BTP qui l'ont employé. Il a bien mérité sa maigre retraite. Exactement comme les Marcel et Roger qui bossaient avec lui et en ont autant bavé. Les patrons des boîtes de BTP qui les ont fait bossé se portent comme des charmes et roulent dans des bagnoles dont leurs anciens ouvriers n'imaginent même pas le prix... 

    3
    Samedi 26 Octobre 2013 à 17:20

    Coucou,

    Jean-Pierre LeGoff oppose la raison à l'émotion médiatique. Au delà du cas individuel, il s'agit de penser et d'assumer une politique de régulation des flux migratoires. Or c'est précisément ce point que le "gauchisme culturel" empêche de traiter sereinement.

    Le résultat c'est que la gauche n'a pas de solution à proposer (hormis la démagogie droit de l'hommiste - abolition des frontières, des nations...) face aux projets dangereux de la droite (remise en cause du droit du sol...)

    Cet évènement révèle le tréfond de la gauche actuelle : la question sociétale devient Le point de rupture pour nombre de solfériniens, qui tout d'un coup se mettent à vilipender le gouvernement, alors que les mêmes se taisent quand il faudrait dénoncer la casse sociale. Autrement dit, le clivage politique AU SEIN DE LA BOURGEOISIE FRANCAISE se fait non pas sur l'économique et le social, mais sur les valeurs. C'est en soi une stratégie politique pour diviser les classes populaires sur l'accessoire.

    Le résultat est d'un côté une bourgeoisie UMPS capable de former des alliances objectives au sein d'institutions technocratiques (UE...)  pour imposer son modèle économique et de l'autre côté un front "du peuple" désuni, discordant : le front national, l'abstention, le front de gauche.

    Il faudrait à l'inverse rassembler les classes populaires sur la défense de leurs intérêts au delà du clivage secondaire sur les valeurs. Vive le "front national de gauche", c'est à dire centriste sur les valeurs et capable de proposer un modèle éco alternatif, forcément centré sur la nation, le territoire français.

    Mais encore faut-il pour cela se débarrasser des gauchistes au sens où Le Goff l'entend.

    Au plaisir,

     

     

      • salvatore Cutugno
        Mardi 3 Mai 2016 à 11:38

        Pourquoi "forcément centré sur la nation, le territoire français" ? On se le demande. Le nationalisme n'est-il pas l'argument creux qu'utilisent les classes favorisées, qui se connaissent et ne s'entretuent pas, pour pousser les classes défavorisées des différentes nations, qui ne se connaissent pas, à s'entretuer ? La lutte entre nations pour empêcher la lutte des classes ? 

    4
    Samedi 26 Octobre 2013 à 22:22

    penser et d'assumer une politique de régulation des flux migratoires

    Pourquoi pas ? Mais faudra surtout penser aux raisons qui font fuir l'Afrique et autres contrées. Le pendant de la régularisation de l'immigration sera la régulation des exportations... 

    Ma tante qui vit au Sénégal depuis 45 ans a vu l'effondrement des productions agricoles concurrencées à mort par l'arrivée de produits agro-alimentaires européens à bas prix. 

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    5
    Dimanche 27 Octobre 2013 à 05:24

    C'est évident.

    6
    BA
    Mardi 29 Octobre 2013 à 10:21

    En Europe, les Etats sont hyper-endettés. Les dettes des Etats européens forment une gigantesque bulle qui va bientôt éclater.

     

    Et la dette privée ?

     

    Qu’en est-il de la dette privée ?

     

    En Europe, les ménages sont hyper-endettés, les entreprises sont hyper-endettées, et les banques sont en faillite.

     

    A propos de la dette des ménages et de la dette des entreprises, le Luxembourg remporte le championnat d’Europe de la dette privée.

    L’Irlande a la médaille d’argent.

    Chypre a la médaille de bronze.

    La France finit 14ème.

     

    Ces dettes privées forment une gigantesque bulle, encore une, qui va bientôt éclater.

     

    Depuis plusieurs années, l’économie des pays européens ne repose que sur … de la dette.

     

    Quand ces bulles éclateront, les pays européens vont connaître un effondrement économique et financier.

     

    1-      Médaille d'or : Luxembourg : dette privée de 317,4 % du PIB (en 2006, c’était seulement 134,7 % du PIB).

    2-      Médaille d’argent : Irlande : dette privée de 306,5 % du PIB (en 2001, c’était seulement 154,7 % du PIB).

    3-      Médaille de bronze : Chypre : dette privée de 296,4 % du PIB (en 1999, c’était seulement 158,6 % du PIB).

    4-      Danemark : 238,9 % du PIB.

    5-      Portugal : 225 % du PIB.

    6-      Pays-Bas : 221 % du PIB.

    7-      Suède : 214,2 % du PIB.

    8-      Espagne : 195,6 % du PIB.

    9-      Royaume-Uni : 181,4 % du PIB.

    10-   Finlande : 160,5 % du PIB.

    11-   Malte : 155,4 % du PIB.

    12-   Autriche : 147,5 % du PIB.

    13-   Belgique : 146,4 % du PIB.

    14-   France : 140,6 % du PIB (en 1999, c’était seulement 95,8 % du PIB).

     

    Source : Eurostat.

     

    http://epp.eurostat.ec.europa.eu/tgm/table.do?tab=table&init=1&language=fr&pcode=tipspd20&plugin=0

    7
    Mardi 5 Novembre 2013 à 10:27

    Faudrait d'urgence une politique de régulation de l'import-export ou pourquoi d'aucuns vont bientôt quitter les pays andins pour trouver l'asile économique chez les "blancos"  qui diront qu'il faut une politique de régulation de l'immigration :

    https://fr.globalvoicesonline.org/2013/11/04/156252/

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