• La rupture, avec Chevènement ?

    Tout au long de sa longue carrière politique, JP Chevènement a toujours appartenu à la même formation politique : le MRC, ex MDC, ex CERES (créé en 1966). Positionné à la gauche du PS - "de faux marxistes, de vrais petits bourgeois" raillera Mitterrand - ce mouvement a été un ardent défenseur de l'union de la gauche autour du programme commun. Le mouvement quitte le PS en 1991, par opposition à la guerre en Irak et au projet de monnaie unique. 

    L'éloignement progressif avec la politique du PS, alimentera chez JP Chevènement, une critique globale du ralliement socialiste au néo-libéralisme dont l'adhésion à l'euro est l'illustration la plus flagrante. Sa critique de gauche va de pair avec un positionnement républicain qui lui fera nouer des alliances avec la droite souverainiste.

    Aujourd'hui, JP Chevènement apparait donc comme un des leader crédible de la gauche de rupture, au moment ou s'opère une convergence objective entre les mouvements autrefois cantonnés "à la gauche de la gauche" à travers les thèmes communs de la démondialisation, de la souveraienté nationale, et de l'antilibéralisme.

    Dans "Pourquoi je serai candidat", Chevènement exprime son positionnement idéologique. Voir aussi :

    - "Faut-il démondialiser ?", entretien au Nv Obs

    - "Le PS a embrassé très tôt la doxa néolibérale", l'Expansion

    - La France est-elle finie ?, Xerfi Canal 

     

    "Pourquoi je serai candidat",  - Juin 2011. Extraits.

    "Cette situation résulte, pour l’essentiel, de choix politiques associant le Parti socialiste et la droite : Acte Unique (1985-1987), traité de Maastricht (1992), pacte de stabilité et de croissance (1997), OMC (1994), traité de Lisbonne (2008), copie conforme du projet de traité constitutionnel rejeté, trois ans avant, par 55 % du peuple français.(...)

    La crise financière et économique mondiale de 2008-2009 et la crise de l’euro de 2010 viennent sanctionner une autre erreur majeure d’orientation, l’acceptation de la dérégulation néolibérale et le choix de construire l’Europe sans, voire contre, ses nations. (...)

    Le capitalisme financier que nous avons laissé s’installer depuis la fin des années 1980 est un système de prédation : il confisque au profit de la sphère financière les bénéfices de l’économie réelle. Ce système qui a explosé en vol en 2008 a été ravalé avec l’appui massif des Etats, c’est-à-dire des contribuables. Mais tout est reparti comme avant : aux Etats-Unis, comme en Europe, les banques ont renoué avec les super profits et avec des bonus extravagants. (...)

    Y a-t-il une probabilité que l’un des candidats socialistes potentiels permette de nous soustraire à la dictature des marchés financiers ? Si on met à part l’évocation par Arnaud Montebourg d’une « démondialisation » dont les modalités restent encore floues, aucun candidat potentiel n’esquisse la moindre autocritique par rapport aux choix du parti socialiste qui ont permis l’installation du capitalisme financier dans notre pays. Le droit d’inventaire, si souvent évoqué, n’a jamais été exercé. La « parenthèse libérale », ouverte en 1983, n’a jamais été refermée ni par François Mitterrand ni par Lionel Jospin.(...)

    Le plus important est de rompre avec la politique d’austérité à perte de vue qu’entraînerait mécaniquement l’application du pacte Merkel-Sarkozy, dit abusivement de compétitivité. Il est nécessaire de concevoir une initiative de croissance à l’échelle de l’Europe tout entière. Cette initiative pourrait s’appuyer d’abord sur une relance salariale dans les pays excédentaires conjuguée avec une politique de change destinée à faire baisser le cours de l’euro vis-à-vis des principales devises."

     

    "Faut-il démondialiser?", Entretien avec Nicolas Baverez dans Le Nouvel Observateur - Septembre 2011

    "Dans le même temps, les Français ont pris conscience du déclassement de l’Europe et du rétrécissement de leur industrie qui ne représente plus que 13% de notre valeur ajoutée aujourd’hui. Dès lors, si le mot de « démondialisation » a l’inconvénient de suggérer qu’on pourrait revenir en arrière, il réintroduit l’idée que l’on peut corriger les excès d’une mondialisation « biaisée » et revenir sur les excès du néolibéralisme. (...)

    Avant de décrire cette mondialisation comme un « fait », il faut dire qu’elle est d’abord un choix politique. Le triomphe du néolibéralisme avec l’élection de Thatcher et de Reagan s’est traduit , au nom du dogme de « l’efficience des marchés » par une complète dérégulation, notamment en matière financière. (...)

    La monnaie unique a correspondu à un choix erroné. (...) A défaut d’une révision complète de l’architecture de la monnaie unique donnant à la BCE le même statut que la Reserve fédérale américaine, je ne vois pas d’autre issue que la mutation de l’euro en monnaie commune, valable pour les transactions avec l’extérieur."

     

    "Le PS a embrassé très tôt la doxa néolibérale", entretien dans l'Expansion - Juin 2011

    "Tout s'est passé comme s'il leur fallait user la gauche au pouvoir et l'amener au "tournant libéral" que la technocratie bien-pensante avait, déjà avant 1981, imaginé pour elle. On les appelait "les rocardiens" ; en fait, ils étaient partout, et Rocard n'y était pour rien ! Tout cela a été conçu par des gens qui savaient où ils allaient et qui étaient décidés à se faire un allié de la puissance des marchés. Jacques Delors était cohérent. Il a passé consciemment un pacte avec ce qu'il appelle "les vents dominants" de la mondialisation. Très peu de gens dans l'administration, en dehors de ceux qui étaient avec moi à l'Industrie, s'opposaient à ce courant dominant, et la plupart de ceux qui avaient la charge d'appliquer le programme sur lequel François Mitterrand avait été élu, en 1981, n'y croyaient tout simplement pas. Il y avait une sorte de frénésie idéologique qui voulait que plus on libéralisait, plus on était "moderne". (...)

    (A propose de Delors) Je le reconnais comme un maître en idéologie. Il a toujours agi avec une bonne conscience inaltérable. Son discours pieux déconnectait parfaitement l'économique et le social, et, avec son disciple Pascal Lamy, il était sans doute convaincu que l'autorégulation des marchés tendait à favoriser la croissance. J'aime ces deux-là. Leur dogmatisme libéral sans peur et sans reproche, tout enrobé de bonne conscience chrétienne moralisante, fait plaisir à voir ! (...) Ne mesurant sans doute pas ce qu'il faisait, c'est lui qui a mis en place la dérégulation sur le continent. Il a fait la politique que Margaret Thatcher et Ronald Reagan appliquaient en Angleterre et aux Etats-Unis. (...)

    Les socialistes restent prisonniers d'une confusion entre l'idée européenne et le logiciel néolibéral présent dans les traités qu'ils ont signés. Ils sont du parti du "Bien". Ils se veulent avant tout de "bons européens". L'Europe les sanctifie. Ils ne se rendent pas compte que l'Europe telle qu'ils l'ont façonnée est régie par des règles essentiellement néolibérales."

      

    La France est-elle finie ? Entretien XERFI Canal

      La rupture avec Chevènement ?

     

     

     


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  • Commentaires

    1
    myla2
    Samedi 3 Décembre 2011 à 09:20

    Bonjour,

    J'ai testé auprès de différentes personnes l'hypothèse jean Pierre Chevènement.

    J'ai pu observé que l'âge de celui-ci est un frein certain pour l'adhésion à cette candidature (je n'ai pas dit à ses idées), particulièrement pour les plus jeunes.

    Pour les gens de gauche, le front de gauche reste le parti le plus crédible. Quels sont les arguments pour voter chevènement, plutôt que front de gauche à ton avis?

    Cordialement,

    Myla2

     

     

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    2
    Coma81 Profil de Coma81
    Jeudi 8 Décembre 2011 à 21:50

    Deux arguments :

    - Sur le contenu, le front de gauche se berce d'illusion quand il avance des solutions dans le cadre de l'euro. Elles seront toutes rejettées par les allemands (intervention massive de la BCE, protectionnisme européen, relance économique). 

    Il faut sortir de l'euro comme le laisse entendre Chevènement. 

    - Le vote utile. L'enjeu est d'être majoritaire et de battre le PS. Chevènement pourrait agréger des votes de tout horizon.

    A noter qu'Emmanuel Todd est optimiste au sujet de la conversion du PS. Selon lui les circonstances lui imposeront la nationalisation des banques et la fin de l'euro. Il redoute par dessus tout la réelection de Sarkozy.

    A voir. Il me semble quand même que la fin de l'euro nécessite à un moment ou à un autre une décision politique, qui si elle n'intervient pas, (contre toute raison), peut prolonger le calvaire au point de faire le jeu du FN. L'horreur absolue serait que ça soit le FN qui en 2017 prenne la décision de sortir de l'euro.

     

    3
    PlacidoMuzo
    Dimanche 12 Février 2012 à 00:43

    Il est possible que des solutions dans le cadre de l'euro soient illusoire : grand devin celui qui, à coup sûr, pourrait lire dans l'avenir. En revanche, ce qui n'est pas illusoire mais constitue une hypothèse réaliste de travail, c'est le fait que si la France, deuxième puissance de l'Europe, faisait rupture, il deviendrait possible, non aux gouvernements européens mais aux peuples d'Europe, de soutenir dans leurs luttes la position de la France. Et si les peuples, suivant l'exemple de l'un d'eux, sortaient de la servitude volontaire ! Un peu de pensée dialectique peut nous aider à l'optimisme.

    Bon, le problème de Chevènement étant désormais réglé, on fait quoi ? On se couche ou on voit ce que dit le Front de Gauche ? Il n'est pas inutile de visionner le meeting de Montpellier du FdG, consacré aux questions économiques. Si ça ne fait pas la différence, forme et fond réunis, alors …!

    4
    Coma81 Profil de Coma81
    Dimanche 12 Février 2012 à 12:20

    Je vais regarder

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