• Le tournant de la rigueur n'a pas trainé

    (mise à jour)

     

    "Le redressement de la compétitivité française passe par de profondes réformes. Il (François Hollande) les a esquissées. A lui de les clarifier et de les mettre en oeuvre. Avec fermeté. N'est pas Schröder qui veut"

    Erik Izraelewicz, directeur du Monde

     

    "Les ministres des finances européens étaient réunis en fin de semaine à Chypre au chevet des pays dits du "Club Med" et de l'Irlande. Et tous se sont réjouis des effets bénéfiques des saignées des derniers trimestres. (...) Aujourd'hui, l'Europe entrevoit la fin de la crise, et le patient français fait grise mine. Il est le seul à n'avoir suivi aucun traitement."

    Arnaud Leparmentier, Le Monde

     

    "Sa tâche [François Hollande] est difficile. Il lui revient de convertir la gauche française à la social-démocratie et de lui faire accepter des réformes qu'en d'autres temps on eût qualifiées de libérales."

    La Tribune

     

    La presse libérale se félicite unanimement des choix du nouveau président. Enfin la France se met à l'heure de la rigueur européenne ! Erik Izraelewicz, directeur du Monde met au défi le président de tenir le cap de la réforme annoncée : "Le redressement de la compétitivité française passe par de profondes réformes. Il les a esquissées. A lui de les clarifier et de les mettre en oeuvre. Avec fermeté. N'est pas Schröder qui veut", en rappelant que le chancelier allemand "avait imposé à son pays des mesures impopulaires". Un autre journaliste du Monde réclame carrément, au vue de la réussite éclatante des purges budgétaires partout en Europe, "une saignée" digne "des médecins de Molière". La Tribune n'est pas en reste, et reconnait à François  Hollande le mérite de "convertir la gauche française à la social-démocratie et de lui faire accepter des réformes qu'en d'autres temps on eût qualifiées de libérales", "tâche" ô combien "difficile". La droite, sous la plume de Nicolas Baverez est toutefois incrédule à propos de la volonté réelle du gouvernement d'aller au bout de ses intentions. Seuls les lecteurs du journal Libération ne sont toujours pas informés du tournant de la rigueur décidé en France par le pouvoir socialiste.

    Eh oui, car, 100 jours après l'élection, il ne reste rien de ce qui donnait une coloration socialiste au programme du PS. Bien que focalisée sur les dérives populistes du président sortant, la campagne présidentielle de l'opposition avait tout de même accouchée de deux produits d'appel - la taxe à 75% et la promesse d'une renégociation du pacte budgétaire "Merkozy" - destinés à attirer la partie de l'électorat menaçant de se réfugier dans l'abstention. Inspirateur de la réforme fiscale, l'économiste Thomas Piketty constate à regret qu "on a l’impression que le gouvernement traîne cette promesse de 75% comme une douleur dont il veut se débarrasser le plus vite possible." Au delà même de la polémique concernant son champ d'application qui s'est réduit comme peau de chagrin, le fait est que cette taxe est déclarée temporaire, instaurée pour deux ans uniquement. Quant à la "réorientation de l'europe", elle est en cours nous dit-on, mais à condition d'entériner le pacte budgétaire auquel le nouveau gouvernement a découvert des vertus qui semblaient lui avoir échappées quand, dans un premier temps, Sarkozy l'avait présenté  aux français. Le pacte de croissance, famélique concession arrachée par le président français à la chancelière allemande - trop contente de s'en tirer à si bon compte -  n'a pas convaincu même les plus fervents de ses supporters - c'est dire. Les minces espoirs suscités par la victoire socialiste paraissent avoir disparus au sein d'une population lassée et déboussolée par une crise économique sans fin. Il était temps que François Hollande s'adresse aux français afin de s'expliquer, en priorité sur la manière dont il pensait faire face à la recession prévue pour la fin de l'année, et sur les moyens qu'il comptait mettre en oeuvre pour  endiguer la montée du chômage.

    C'est donc le moment qu'a choisi François Hollande pour annoncer un plan d'austérité sans précédent depuis 30 ans. Plus précisément 29 ans et le "tournant de la rigueur" de 1983 du gouvernement Mauroy, qui avait marqué le début de l'ère d'une nouvelle gauche, libérale et proeuropéenne. Si, dans leur discours, les dirigeants du PS  ont dû composer avec "le surmoi marxiste du parti" - dénoncé par tant d'éditorialistes de Libération et du Nouvel Observateur - en revanche, la politique économique a sû maintenir, sans faillir, le cap du franc fort et de la rigueur, au prix d'un chomage élevé touchant prioritairement les classes populaires, lâchées par le PS. Au fond, l'accession au pouvoir d'un homme politique comme François Hollande - ou d'un Strauss-khan si le sort ne s'en n'était pas mêlé  - qui consacre l'hégémonie de cette gauche si "moderne", est un soulagement. Elle met fin à l'hypocrisie qui aura régnée à gauche pendant de si longues années. Cette fois-ci, les français ne pourront pas dire qu'ils ne savaient pas qui ils ont élu.

    Le journal La Tribune rappelle opportunément que François Hollande "a commencé sa carrière politique en accompagnant Jacques Delors", le véritable artisant du plan de rigueur de 1983 qui eu pour conséquence de faire chuter les revenus des français "comme jamais". A cette époque l'alternative, consistant à dévaluer et sortir du Système Monétaire Européen, n'était pas envisageable pour les élites françaises trop engagées dans la construction d'un nouvel ordre monétaire et financier européen. Selon La Tribune, "Aujourd'hui, si François Hollande tient à l'objectif de 3% de déficit public en 2013, un objectif considéré comme dangereux par de nombreux économistes, c'est bien parce que l'annonce d'un report de cet engagement déclencherait une véritable crise avec nos « amis » allemands." L'histoire se répète.


    Pour ceux qui veulent savoir pourquoi il n'y a pas d'alternative à cette politique

    Pour ceux qui veulent savoir pourquoi on pourrait malgré tout faire autrement

     


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  • Commentaires

    1
    RadTransf
    Mercredi 12 Septembre 2012 à 01:08

    La proposition des 75% fut sortie du chapeau face à un journaliste quand le FdG a commencé à prendre des points dans les sondages. Même son conseiller sur les questions fiscales, et présentement ministre du budget n'étáit pas au courant.

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