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Melenchon : le retour d'une France tournée vers la méditérranée
" Il est temps de se souvenir, quand l'Union Europénne peut parfois faire tourner le regard vers les horizons lointains qui sont à l'est de notre continent - et si nous sommes enchantés - il ne faut jamais oublier que le socle de l'identité républicaine de la patrie est dans la méditerrannée et que, par conséquent, les peuples qui en sont riverains, tous, sans exception, mais en commençant par ceux avec qui nous sommes unis par les liens du sang et avec qui nous fondons une même famille, non seulement parce que nous avons des enfants et des petits enfants en commun, mais aussi parce que nous avons, pour nombre d'entre eux, en usage commun une langue qui nous appartient à tous. Il faut se souvenir que les peuples du Maghreb sont nos frères et nos soeurs. Il faut répéter qu'il n'y a pas d'avenir pour la France sans les arabes et les berbères du Maghreb. Nous faisons donc, nous, ce pari sur l'avenir, et cette promesse à ceux qui nous écoutent à cette heure de l'autre côté de la méditérranée : vous avez ici ce peuple français fraternel, bigarré, composite, qui vous ouvre les bras et vous dit : la guerre est finie ; maintenant nous sommes en famille. "
(Par Coma81) :
A l'heure de l'effondrement du mythe de l'Europe fédérale, s'impose ce qui fait, depuis l'origine, la richesse du continent, à savoir les réalités nationales et les aires culturelles qui le traversent, le fragmentent et le débordent largement pour s'étendre au-delà.
A la place de l'Europe atlantiste - du choc des civilisations, forteresse chrétienne pour petits blancs assiégés, retirée de l'histoire sous protectorat américain, le candidat du peuple appelle à renouer avec notre histoire méditerranéenne.
Pendant toute cette dernière période, la stratégie des élites françaises, redoutant la réunification allemande, avait consisté, en imposant l'euro, à arrimer définitivement l'Allemagne à l'ouest et à créer un espace intégré sinon culturellement, du moins économiquement et socialement. Dans leur esprit, à terme, la fédéralisation de la zone créerait une puissance supra-nationale, faisant de l'Europe un acteur puissant de la mondialisation. Mais une autre réunification, celle du continent européen, avec l'élargissement de l'UE aux pays de l'Est, est venue anéantir cette perspective. Progressivement, l'Allemagne, avec à sa tête une femme issue de l'ex-RDA, a renoué avec son tropisme oriental.
N'accablons pas, comme le font tous les déçus du rêve fédéral, l'Allemagne, tentée par le sonderweg (la voie particulière), de vouloir se ménager un espace à l'Est et de se tourner vers la Russie. Drôle d'idée, après tout, d'avoir pu croire qu'en affaiblissant les nations, on pourrait construire une Europe forte. Le retour de l'Allemagne au rang des puissances mondiales renvoit les élites françaises à leur propre échec. Au fond, celles-ci avaient cessé de croire à la France. "La France est notre patrie, l'Europe est notre avenir" avait dit Mitterrand, formule sonnant comme l'acte de décès programmé de notre nation. Mais qui peux prétendre décréter la fin d'une réalité plongeant ses racines si loin dans l'histoire ?
Avec Jean-Luc Mélenchon, pour la première fois, un dirigeant français parle de l'avenir de la France, qui ne se solderait pas par un dépassement dans un grand tout européen. La France est latine, méditérranéenne, ancienne puissance coloniale qui a noué des relations de sang avec des peuples maghrébins et africains, avec lesquelles nous avons en commun une langue.
A travers la promotion de la France méditérranéenne, c'est toute la conception de l'Europe qui se trouve transformée. Les peuples européens ne sont pas un - même s'ils doivent être unis. Cela ouvre la voie, voulons nous croire, à un divorce à l'amiable avec l'euro, et au renouvellement de la façon de coopérer entre nations européennes.
Mais, plus que le retour aux racines, ce discours va au-delà, en traçant des perspectives. A la suite d'une décennie de choc des civilisations - prophétie autoréalisée par l'Amérique de Bush, et au moment où le thème de l'islam devient majeur dans le débat politique, cette nouvelle gauche cherche, au sujet de la forte présence sur notre sol de population musulmane issue de l'immigration maghrébine, un souffle qui permette d'intégrer cette nouveauté historique au récit national. Loin d'être une menace pour l'identité nationale, le métissage dessine de nouvelles frontières pour un projet de société qui serait national, hérité de notre passé colonial, ouvert aux peuples frères, francophones, de l'autre côté de la Méditerranée.
Le printemps arabe sera-t-il à la France ce que la chute du mur a été à l'Allemagne ?
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Commentaires
Ah oui, tout à fait! vous avez bien fait d'expliciter ainsi votre vision des choses et je suis, bien sûr, mille fois d'accord avec vous! Pour le coup, Je me sens partie prenante sans réserve de cette France-là!