• La pensée unique est morte (suite). En france, la décomposition du système a commencé en 2002 avec l'élimination au premier tour  de la présidentielle, du candidat socialiste Lionel Jospin. Pour la petite histoire, mon prof de philo de l'époque (Etienne Tassin), un quinqua-socialiste-nostalgiquede1968, avait cru déceler pour la génération de ses étudiants LE grand moment de conscientisation politique. Eux 1968, nous 2002. Ca sentait l'arnaque.  Toute la gauche morale post soixante-huitarde a envoyé sa progéniture manifester comme un seul homme contre Jean-Marie Lepen, cet affreux jojo tellement caricartural. Je n'avais pas bien compris alors, le parallèle avec mai 68, ce moment où des jeunes gens turbulents avaient profondément déçu leurs parents en refusant le destin tout traçé que ceux-ci avait conçu pour eux. Toujours est-il que le retour à l'ordre moral anti-fasciste n'a duré que le temps d'un défilé bastille nation. En 2005, le système plante à nouveau et le mal ("les europhobes") met une déculoté au bien ("ben l'europe").

    C'est depuis cette époque que des discours alternatifs commencent à être audibles. Avec les coups de boutoirs qu'ont été le référendum sur le TCE et la crise économique de 2008, règne maintenant la confusion idéologique la plus totale. 

    L'atmosphère se détériore - ou plutôt elle s'améliore - à mesure que le magistère intellectuel des élites officielles décline. En cette fin d'année 2011, il semble bien que tout le monde soit revenu "a égalité". Nul besoin de faire de long discours donc, passons directement à l'insulte. Sur France 5, Alain Minc, Emmanuel Todd et Michel Onfray inaugurent cette nouvelle approche en début d'emission pour lancer le débat.

    Ah oui, sinon le thème c'est l'euro. Toute la panoplie de la gauche est représentée face à Alain Minc : la gauche morale par Cynthia Fleury, l'autre gauche avec Emmanuel Todd et la gauche anti-libérale par Michel Onfray.  Force est de constater que le héros de la gauche anti-libérale est attiré, comme un insecte par la lumière, par les polémiques oiseuses lancées par le rusé Minc : lepen, l'impérialisme américain, la guerre en Lybie, le plombier polonais, (on se demande s'il ne représente pas en fait une gauche ultramorale) et le téléspectateur peut remercier son compère Todd de ramener chaque fois le débat à l'essentiel, la faillite économique de la monnaie unique.

    Un dernier mot sur la gauche libérale, dont on sait qu'elle est traditionnellement en difficulté sur le thème du protectionisme, thème qui, par la simple présence d'emmanuel Todd arrive fatalement dans la discussion. La philosophe Cynthia Fleury surprend son monde en adoptant une stratégie réthorique digne des meilleurs sophistes grecs, en inversant la perspective : oui, le protectionnisme est une réalité, et d'ailleurs l'OMC sous le patronage de Pascal Lamy, qu'elle remercie au passage (sans rire), est là pour garantir que le commerce mondiale respecte les normes éthiques, sociales, et environnementales pour le plus grand bonheur du plus grand nombre. Ces socialistes sont impayables des gros cons.

     

     

     


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  • Hubert Vedrine invité au Figaro pour commenter les résultats du sommet européen du 26 octobre :

     


      

      

    Le fédéralisme n'est pas la solution miracle à la crise, Hubert Védrine, ancien ministre des affaires étrangères - 2011.  Article intégral .  

    Les sempiternelles lamentations sur les "égoïsmes nationaux" et les appels, pendant les semaines qui ont précédé l'accord de Bruxelles du 21 juillet - le meilleur possible -, à plus de fédéralisme, présenté comme la panacée, comme à de nouveaux transferts de souveraineté sont paradoxaux.

    A-t-on déjà oublié que l'aggravation dramatique de la dette publique européenne ne résulte pas seulement de la gestion irresponsable de l'Etat-providence et des décennies de budgets en déficit, mais aussi de l'effet sur le système financier européen de l'implosion de la finance américaine, devenue un "danger public", selon le banquier et ancien ambassadeur de Bill Clinton à Paris, Felix Rohatyn ? Et celle-ci n'a-t-elle pas été provoquée par la dérégulation, c'est-à-dire... les abandons massifs de souveraineté effectués pendant plus de vingt ans par plusieurs administrations américaines au profit des marchés ? Que faut-il abandonner ou transférer en plus ?

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  • Tout au long de sa longue carrière politique, JP Chevènement a toujours appartenu à la même formation politique : le MRC, ex MDC, ex CERES (créé en 1966). Positionné à la gauche du PS - "de faux marxistes, de vrais petits bourgeois" raillera Mitterrand - ce mouvement a été un ardent défenseur de l'union de la gauche autour du programme commun. Le mouvement quitte le PS en 1991, par opposition à la guerre en Irak et au projet de monnaie unique. 

    L'éloignement progressif avec la politique du PS, alimentera chez JP Chevènement, une critique globale du ralliement socialiste au néo-libéralisme dont l'adhésion à l'euro est l'illustration la plus flagrante. Sa critique de gauche va de pair avec un positionnement républicain qui lui fera nouer des alliances avec la droite souverainiste.

    Aujourd'hui, JP Chevènement apparait donc comme un des leader crédible de la gauche de rupture, au moment ou s'opère une convergence objective entre les mouvements autrefois cantonnés "à la gauche de la gauche" à travers les thèmes communs de la démondialisation, de la souveraienté nationale, et de l'antilibéralisme.

    Dans "Pourquoi je serai candidat", Chevènement exprime son positionnement idéologique. Voir aussi :

    - "Faut-il démondialiser ?", entretien au Nv Obs

    - "Le PS a embrassé très tôt la doxa néolibérale", l'Expansion

    - La France est-elle finie ?, Xerfi Canal 

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  • Ce qui est fascinant dans ce débat c'est l'attitude de Michel Camdessus, ancien directeur général du FMI, qui a accepté de venir dans le piège tendu par Frédéric Taddéi. En face de lui, deux contradicteurs, les économistes Paul jorion et Alain Cotta; autour, des personnalités hostiles, de sorte que l'on avait l'impression, à travers cette mise en scène, d'assiter au procès du néolibéralisme.

    Homme affable et habile, il adopte la stratégie bien connue du retournement de veste, cédant volontier à tous les points de vue, sans avoir eu l'air de se rendre compte qu'il ait jamais été un homme de main du système.

    Et plus c'est gros plus ça passe. Dans un premier temps il minimise la crise, évoquant "l'irrationalité des marchés", mais suite à une longue tirade de Paul Jorion comparant l'effondrement du système à la chute de l'empire romain  il répondra, d'un natural confondant : "Je suis tout à fait d'accord avec vous" et citera le philosophe Valéry.  

    Puis à l'interpellation de Clementine Autain, de la gauche anti-libérale : "il y a un point sur lequel je suis tout à fait d'accord avec vous, c'est que la révolution néolibérale, et la manière dont elle a écarté tout préocupation de justice, est pour beaucoup dans tout ce qui a suivi." 

     

     

     


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  •  "Je crois que la criminalité dans nos rues ne peut pas être dissociée de la désintégration morale dans les plus hauts rangs de la société britannique moderne. Les deux dernières décennies ont vu une baisse terrifiante dans les principes de l’élite britannique au pouvoir. Il est devenu acceptable pour nos politiciens de mentir et de tricher. Une culture quasi-universelle de l’égoïsme et de la cupidité a grandi. (...) Ce n’est pas seulement sa jeunesse abimée, mais la Grande-Bretagne elle-même qui a besoin d’une réforme morale."

    Peter Oborne, The Telegraph

     

    "Et si nous, les conservateurs libéraux, nous nous étions trompés ? et si ce à quoi nous avons cru, l’économie de marché, n’avait jamais été qu’un moyen pour le plus petit nombre de faire travailler le plus grand pour acquérir le maximum de capital et donc de liberté ?"

    Stéphane Denis, Valeurs Actuelles

      

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  • Le tournant de la rigueur en 1983, a signifié la fin de l'aventure de la sociale démocratie en France. La transformation sociale n'a plus été à l'ordre du jour, et le soutien des classes populaires s'est délité progressivement. Dès lors, les deux partis de gauche, qui partageaient alors une base idéologique et programmatique commune, ont évolué chacun à leur façon.

    Le parti communiste, sans perspective politique dans le contexte hostile de la mondialisation, mais fidèle à sa rhétorique anticapitaliste, s'est effondré électoralement. Deux fois discrédité, par sa grande erreur historique de s'être compromis avec le totalitarisme soviétique, mais aussi par sa stratégie d'alliance avec un parti socialiste désormais converti au capitalisme et à l'économie de marché, il a de moins en moins été en mesure d'attirer à lui les votes contestataires. On sait que le FN s'est chargé très tôt de délester le PC d'une partie du vote des classes populaires, avant que l'essor de l'extrème gauche, à partir de 2002, ne vienne définitivement l'achever.

    Du côté des socialistes, le tournant de la rigueur, a donné le coup d'envoi à une évolution sociale-libérale du parti, qui, avec le déclin du parti communiste, a vu disparaitre toute menace sur sa gauche. Au contraire, le basculement à l'extrême droite des catégories populaires lui a permis de se positionner en rempart contre "le fascisme" et de se recentrer en parti promoteur du libéralisme culturel et défenseurs des minorités. Le rapport récent de Terra Nova, think tank influent du PS, est l'aboutissement de ce long cheminement idéologique, qui veut assumer pleinement le divorce avec les perdants de la mondialisation, ouvriers, employés, ruraux, tous abandonnés à la droite lepéniste.

    Le spectre politique de ces trentes dernières années s'est donc organisé autour de partis dits de gouvernement et de partis anti-système dont les scores n'ont cessé de progresser, d'abord par la droite avec le FN, puis dans la période récente, par la gauche, avec le parti d'Arlette Laguiller et celui d'Olivier Besancenot. Au cours des années 2000, le système a cédé à deux reprises : en 2002, lorsque le candidat du Front National a été qualifié au second tour de l'élection présidentielle, en lieu et place du favori à la victoire, le socialiste Lionel Jospin; en 2005, lorsque le peuple français a voté contre ses élites lors du référendum sur le TCE.

    Le rejet en mai 2005 du projet de "constitution pour l'europe" est une date clé. Elle clôt la période du consensus néo-libéral en France, caractérisée par la très grande proximité idéologique des partis de gouvernement - le philsophe Marcel Gauchet dénoncera la "pensée unique" de la classe dirigeante -, aboutissant à cette situation, absurde, lors de l'élection présidentielle de 2002, d'un candidat socialiste proclamant haut et fort que "son projet n'est pas socialiste"  tandis que son adversaire de droite est qualifié par nombre de commentateurs de "radical-socialiste" (du nom de ce parti de centre-gauche de la 3ème république).

    Plus encore, cette date est celle du divorce des français d'avec la construction européenne, laquelle représentait le fond de commerce idéologique du Parti socialiste. Suite à l'échec des plans de relance en 1981, le parti en avait conclut à l'impossibilité d'établir "le socialisme dans un seul pays", et il lui avait fallu donner un nouvel horizon au peuple de gauche. C'est pourquoi, à partir de 1983, Mitterand fit le choix d'une relance la construction européenne, qui donna le projet de monnaie unique adopté par référendum en 1993. Jean Pierre Chevènement, qui a bien connu cette période en tant que ministre du gouvernement mitterand, témoigna plus tard que le président socialiste en vint à faire de « l’Europe, un mythe de substitution au projet de transformation sociale qui l’avait porté au pouvoir en 1981 ». D'où la profonde légitimité de la construction européenne aux yeux du peuple de gauche, comme possibilité de refaire au niveau européen, ce qui a été défait par la mondialisation. Le choix de l'euro était envisagé comme le prélude à une europe sociale. Afin de convaincre les derniers indécis, quelques semianes avant le référendum de 1993, Jacques Delors pris cet engagement : "Votez Oui à Maastricht et on se remettra au travail tout de suite sur l'Europe sociale

    Mais l'Europe n'a pas tenu ses promesses. La victoire de la gauche en 1997, dans un contexte européen très favorable à la sociale démocratie, a fait naître l'espoir d'un grand pas en avant sur le terrain du social. Déception immédiate suite à l'échec du sommet d'Amsterdam, qui devait être la grand messe de l'emploi, mais qui confirmera la dérive néo-libérale du projet européen. Autre élément important, les peuples européens ont été rattrapés par leur histoire. Dans la foulée de la chute du mur de Berlin, les pays d'ex-europe de l'Est exprimèrent le désir légitime d'intégrer le projet européen, et de sceller ainsi la réunification politique du continent. Ce faisant, s'est éloigné définitivement la perspective d'une plus grande intégration économique et sociale.

    Tout d'un coup, l'Europe est apparue pour ce qu'elle est devenue, libérale. Paradoxalement, l'euro eu donc pour effet de stopper nette la construction européenne, les états se contentant uniquement de jouer chacun leur partition, dans le cadre des règles qui avaient été définies lors du traité de maastricht et qui leurs semblaient suffisantes. Le "non" de 2005 a signifié le rejet d'une europe perçue comme une zone de dumping fiscal et social généralisée.  La fuite en avant de l'élargissement continua après 2005, les politiques de dérégulation aussi. Le traité de Lisbonne, nouveau nom du TCE, est adopté en force, accentuant encore la perte de légitimité des institutions de l'UE aux yeux des français. 

    Le bilan est donc catastrophique pour les socialistes français qui auront accompagné, tout le long, la mutation néo-libérale de l'UE, faisant campagne en faveur de la constitution, avant d'être désavoués par leur propre électorat. La crise actuelle de l'euro, qui pourrait conduire à l'éclatement de la zone, achève de les discréditer, eux qui ont tant investit politiquement sur cette idée.

    Comment comprendre aujourd'hui les propos de Jacques Delors, grand bâtisseur de la monnaie unique, qui reconnait "un vice de conception" ? Selon lui, "l'Union économique et monétaire était fondée sur l'équilibre entre le pouvoir monétaire et le pouvoir économique. Il impliquait qu'à côté de l'indépendance de la Banque centrale européenne (BCE) il y ait un pôle économique qui, compte tenu du contrat et de l'esprit du traité, ne pouvait prendre qu'une forme : la coopération. Cette coopération n'a pas eu lieu." On aurait aimé qu'il s'exprime sur la responsabilité inouïe des socialistes français, qui ont pêché soit par duplicité vis à vis de leurs électeurs, soit par naiveté face à leurs partenaires.

     


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  • Le Think Tank, proche du PS, publie un rapport  qui déclenche la polémique au sein de la gauche. La lecture de ce rapport est édifiante et accablante pour ses auteurs, qui proposent ni plus, ni moins d'abandonner les classes populaires, en même temps que tout projet de transformation sociale. Les auteurs sont à la recherche de la coalition des électeurs s'identifiant à ce qui serait devenu selon eux le marqueur principal de la gauche : le libéralisme culturel.

      

    Petit aperçu de la polémique:

    Gauche : quelle majorité électorale pour 2012 ?, Rapport de Terre Nova

    Gauche : d'une stratégie de classe à une stratégie de valeurs, Olivier Ferrand, président de Terra Nova

    «Sans les classes populaires, la gauche ne sert plus à rien, elle n’est plus rien», Par Aquilino Morelle, Professeur associé à Paris-I et conseiller politique de Lionel Jospin à Matignon de 1997 à 2002

     

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  • Un autre marxisme pour un autre monde

     

    Dans la tour­mente de la mon­dia­li­sa­tion néo­li­bé­rale, la gauche est en­trée en ré­ces­sion. La France, pays de l’exception sup­posée, s’aligne sur une si­tua­tion dé­sor­mais quasi gé­né­rale : un af­fai­blis­se­ment his­to­rique de l’antagonisme entre des pré­ten­tions po­li­tiques ri­vales. As­su­mant le dis­cours de la droite ré­ac­tion­naire et une po­li­tique éco­no­mique li­bé­rale, M. Ni­colas Sar­kozy est par­venu à se faire en­tendre des couches po­pu­laires les plus fra­gi­li­sées. Il a réussi à convaincre que lui seul dé­tient les moyens de réa­liser les es­poirs qu’incarnait la gauche, dont il rallie les idéo­logues et neu­tra­lise les chefs de file. La conver­gence ul­time l’a-t-elle em­porté sur la « lutte finale » ?

    Par Gé­rard Du­ménil, éco­no­miste, di­rec­teur de re­cherches au Centre na­tional de la re­cherche scien­ti­fique (CNRS) (EconmiX) et  Jacques Bidet, phi­lo­sophe, pro­fes­seur émé­rite à l’université Paris-X (Nan­terre)

     

     

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