• La démondialisation sème la pagaille chez les altermondialistes

    En juin 2011, face au succès rencontré, dans le débat français, par le nouveau mot de "démondialisation", popularisé entre autre par Jacques Sapir puis par Arnaud Montebourg qui décide d'en faire son thème de campagne pour les primaires socialistes, des membres de l'association altermondialiste ATTAC publient une tribune dans Médiapart pour condamner fermement l'impasse à laquelle conduit toute tentation de repli national:

    "C'est dans ces moments d'extrême tension que les politiques brunes se fraient un chemin sous les déguisements les plus divers. La guerre commerciale et monétaire aggraverait la concurrence entre les États et détruirait l'idéal de solidarité que doit porter tout projet progressiste."

    La guerre est déclarée entre les nouveaux démondialisateurs et les altermondialistes canal historique d'ATTAC. Les propos ne sont pas toujours courtois entre anciens camarades de "la gauche de la gauche".

    A cette Tribune d'ATTAC ont répondu trois figures du mouvement mis en cause : Jacques Sapir - Oui, la Démondialisation est bien notre avenir, Frédéric Lordon - Qui a peur de la démondialisation ? - et Bernard Cassen - L’heure de la démondialisation est venue.

    Dans les colones du Monde, Roger Martelli, historien des idées, demandera un cessez le feu (Halte au feu !). Puis, dans une ambiance plus apaisée, un débat aura lieu sur le plateau de l'emission-web arrêt sur image entre Frédéric Lordon et Thomas Coutrot d'ATTAC.

    Sur le fond, ce débat va laisser des traces au sein de "la gauche de la gauche". Les altermondialistes n'ont pas hésité à associer les partisans de la démondialisation au FN. Au delà de l’insulte, c’est une erreur d’analyse politique. Le regain d'attention envers le fait national ne doit rien à l'extrême droite, mais a été maturé au sein de la gauche française, à travers la réhabilitation de l’Etat nation, en particulier par le philosophe Marcel Gauchet.

    La démondialisation rebat les cartes de la configuration idéologique de la gauche, partagée entre une force politique d'accompagnement de la mondialisation néo-libérale, et une gauche anti-libérale renvoyée aux marges du spectre politique. L'altermondialisme a beaucoup contribué à rendre intelligible ce nouveau capitalisme qui s'est déployé ces 30 dernières années, mais ce mouvement a échoué, comme il fallait s'y attendre, à proposer un projet politique praticable à l'échelle internationale. 

    Il était temps de sortir de la pure contestation pour enfin se doter d’un projet qui redonne au peuple une prise sur son destin, par la souveraineté retrouvée de la nation. L’abandon de l’utopie internationaliste est aussi un pas en avant vers une véritable coopération entre nations à l’échelle de l’Europe et du monde. La "démondialisation" offre un projet fédérateur à la gauche qui, jusque là, était privée de perspectives crédibles. C'est le dénominateur commun à une gauche qui va au delà de l'antilibéralisme traditionnel et sera le pivot d’un retournement du rapport de force au sein de la gauche.

    * * *

      

    La démondialisation, un concept superficiel et simpliste 

    Tribune dans Médiapart de Geneviève Azam, Jacques Cossart, Thomas Coutrot, Jean-Marie Harribey, Michel Husson, Pierre Khalfa, Dominique Plihon, Catherine Samary et Aurélie Trouvé, membres du Conseil scientifique d'Attac, qui s'inquiètent de la fortune rencontrée par la  «démondialisation», qui induirait la suspension des logiques de coopération nécessaires au progrès des droits sociaux sans résoudre aucune des crises actuelles - 6 juin 2011

     

    "La «démondialisation» est un concept à la fois superficiel et simpliste. Superficiel parce que, à la racine de la financiarisation mondialisée, il y a les décisions de forces sociales et de gouvernements nationaux, décidés à remettre en cause partout les droits sociaux. L'oligarchie n'est pas étrangère, l'ennemi n'est pas le travailleur chinois. Simpliste car les réponses à la crise nécessitent «plus de mondialisation» dans certains domaines et «moins de mondialisation» dans d'autres, mais exigent surtout une mutation radicale de la logique même de la mondialisation (alter-mondialisation)...  (...)

    Nous ne croyons pas que le retour au national résoudrait la crise de la démocratie car celle-ci est profondément enracinée dans des mécanismes qui, y compris au niveau national, écartent les citoyens des décisions qui les concernent. La démocratie doit se construire partout où les pouvoirs de décisions déterminent notre existence, c'est-à-dire du local au mondial, même si évidemment le niveau national garde toute son importance. (...)

    Nous tirons la sonnette d'alarme parce que les politiques d'austérité, aggravant la crise, mènent les sociétés au bord de l'explosion: Grèce, Portugal, Espagne, Irlande. Demain, Belgique, Italie, France? C'est dans ces moments d'extrême tension que les politiques brunes se fraient un chemin sous les déguisements les plus divers. La guerre commerciale et monétaire aggraverait la concurrence entre les États et détruirait l'idéal de solidarité que doit porter tout projet progressiste. Qui osera proposer la démondialisation et le repli national aux participants du Forum social mondial, aux jeunes en lutte sur la Place Tahrir ou à la Puerta del Sol? Bien au contraire, la conquête nécessaire de la souveraineté démocratique au plan national doit s'articuler à la construction de mouvements sociaux et citoyens européens et internationaux, qui seuls permettront d'éviter que les conflits sociaux ne soient détournés vers des logiques de rivalités nationales et identitaires."

     

    Cette tribune a donné lieu à 3 réponses par les 3 principaux intellectuels mis en cause : Frédéric Lordon, Jacques Sapir, et Bernard Cassen.

     

    1. Qui a peur de la démondialisation ? Frédéric Lordon - Juin 2011. Extrait à la hâche. (la lecture du texte orginal est vivement recommandée)

    "(...) Il ne faut se faire aucune illusion, spécialement quand la nouvelle dirigeante du FN s’avère plus futée que son prédécesseur, et démontre déjà assez son talent de récupération : le FN mangera à tous les râteliers, captera tout ce qu’il peut capter, si bien qu’installer le mythe de l’anti-Midas – « le FN transforme en plomb tout ce qu’il touche » – est le plus sûr moyen de contribuer soi-même à la dégradation de ses propres débats. On n’abandonnera donc pas le débat de la démondialisation sous prétexte que le FN qui a senti la bonne affaire s’y vautre avec délice ! (...)

    Il faut une singulière mauvaise foi, doublée d’une réelle incohérence, pour d’une part prêter aux discours de la démondialisation, par une imputation d’essence, d’avoir d’abord désigné « le travailleur chinois comme ennemi » pour se réserver ensuite le joli rôle de la relocalisation, de la réduction des flux de marchandises et de l’arrêt de « la concurrence entre travailleurs du monde » (...)

    Mais c’est une étrange réticence celle qui interdit de dire « démondialisation » quand la conscience populaire a identifié la chose qu’elle nomme « mondialisation » comme l’origine de ses souffrances et qu’une analyse rigoureuse peut venir pleinement ratifier cette identification. Les signataires se rendent-ils comptent qu’avec leur dénonciation du « repli national » – et l’on sent bien qu’on a échappé de peu à la « frilosité » et à « l’égoïsme » de ceux qui ont « peur » de « l’ouverture » –, on retrouve sous leur plume les pires lieux communs de l’éditorialisme libéral – ou comment faire tourner soi-même les moulins de ses propres adversaires… Mais le plus grave dans cette convergence, certes ponctuelle mais troublante, tient à la fabrication d’une de ces antinomies qui font, là encore, la joie du commentaire autorisé, antinomie au terme de laquelle la « mondialisation » n’a pour alternative que le « refermement national ». Le monde mondialisé ou la nation archaïque, et choisissez votre camp… (...)

    Quoi qu’on en pense, la solution de la reconstitution nationale de souveraineté impose son évidence parce qu’elle a sur toutes les autres l’immense mérite pratique d’être là, immédiatement disponible – moyennant évidemment les transformations structurelles qui la rendent économiquement viable : protectionnisme sélectif, contrôle des capitaux, arraisonnement politique des banques, autant de choses parfaitement réalisables pourvu qu’on le veuille. Que les peuples soient tentés de faire retour, et par le chemin le plus court, aux reconstitutions de souveraineté qui sont à leur portée, il n’y a pas lieu de s’en étonner, encore moins de leur en faire la leçon. (...)

    « Mondialistes » et « nationalistes » pèchent alors par méconnaissances symétriques. Les premiers, par intellectualisme idéaliste, méconnaissent la nécessité d’une fabrication de commun antécédente comme prérequis à toute constitution de souveraineté politique. Les seconds ont fixé à tout jamais le seul commun possible dans les limites éternelles des nations d’aujourd’hui. Des « internationalistes raisonnables », parmi lesquels on rangerait les signataires, se présentent en se disant « européens » (on va leur éviter le péjoratif « européistes »). Accordons-leur ceci : en effet, entre la mondialisation et les nations, il y a la régionalisation comme espace envisageable de redéploiement d’une politique. Reste la question de son périmètre. Or la cartographie des révoltes actuelles n’est pas celle de l’Union européenne telle que les signataires voudraient la voir muter en authentique Europe politique. Où passent donc les limites d’un commun « européen » susceptible de faire souveraineté ? Grèce, Espagne, Portugal, Italie, France, à l’évidence. (...)

    Ce nouveau peuple souverain se constituerait sur la base d’une organisation économique qui, de fait, aurait mis un terme à la mondialisation financière et, par un protectionnisme ciblé, aux inégalités du libre-échange généralisé, autre manière de dire qu’il aurait démondialisé, et que le dépassement des anciennes nations n’est nullement incompatible avec la démondialisation (laquelle, inversement, n’est nullement vouée à signifier « repli national »). C’est même en fait l’exact contraire ! La démondialisation pourrait bien être la condition nécessaire à la reprise d’un projet outre-national raisonnable, c’est-à-dire régional, et toujours sous la réserve d’une circonscription bien pensée (car on ne fait pas communauté politique avec n’importe qui). Sauf à ce que la gauche critique se mette à avoir peur des mots, il lui faudra bien reconnaître que « démondialisation » est le nom même de la réouverture du jeu, que celui-ci conduise à ré-explorer les possibilités de souveraineté des nations présentes (si aucune autre solution n’est praticable) ou à persister dans l’idée d’un projet outre-national, mais cette fois en poursuivant un objectif fondamentalement politique par des voies politiques – car la production du politique par l’économique, ça ne marche pas. Et dans tous les cas, si vraiment il n’est pas de question plus fondamentale que celle de la souveraineté, et que son oubli est l’assurance des pires catastrophes, alors il est temps de renverser l’adage dont on dit qu’il fit la fortune électorale de Bill Clinton, d’ailleurs mondialisateur patenté et artisan notoire du monde écroulé d’aujourd’hui : it’s the politics, stupid."

     

     Frédéric Lordon et Thomas Coutrot (ATTAC) à Arrêt sur image :

     

     

     

    2. Oui, la Démondialisation est bien notre avenir, Jacques Sapir - Juin 2011.

    "(...) L’ennemi est bien désigné pour qui sait lire : c’est l’État-Nation. Les mesures impulsées dans son cadre ne peuvent «résoudre aucun des problèmes qui se posent à nous ». Pire, elles sont susceptibles de déchaîner des démons nationalistes. 

    On connaît ce discours, mais il n’a que les apparences de l’internationalisme. Ce dernier, comme le disait Jaurès, n’était pas contradictoire à la Nation. « Un peu d’internationalisme écarte de la patrie, beaucoup d’internationalisme y ramène ». Chez les auteurs du texte c’est au contraire une véritable haine de la Nation qui imbibe chaque ligne. Ceci provient d’une confusion (encore une) entre l’internationalisme comme principe identifiant des problèmes communs aux hommes et le pseudo-internationalisme postulant une identité directe et immédiate entre les hommes. 

    Ce pseudo-internationalisme renvoie en réalité aux mêmes illusions d’un monde homogène que la théorie néoclassique. Et, derrière l’idéologie de la mondialisation, comment ne pas voir la refiguration du grand marché composé d’une myriade d’individus tous identiques, obéissant tous aux mêmes principes (la maximisation), et soumis aux mêmes lois prétendument naturelles sans la médiation d’un ordre politique C’est pourquoi la démondialisation est un projet radicalement nécessaire et en parfaite cohérence avec une vision de l’économie qui dénonce ces illusions. Il faut donc réaffirmer que sans souveraineté nationale il ne saurait y avoir de démocratie. Sans frontière, il devient impossible d’identifier une communauté politique commune. Au-delà, la crise impose de penser l’échelle de l’État-Nation comme une étape indispensable. (...)

    Pouquoi un tel texte ? À le lire on retrouve les formules qui ont jusqu’à maintenant été utilisées pour justifier l’inaction et le renoncement. On parle ainsi de « convergences des résistances et des initiatives populaires », belle formule assurément, mais qui ne recouvre que des mouvements dans trois pays (l’Espagne, la Grèce et le Portugal) et dont rien ne dit qu’ils convergeront réellement. En fait, pour ce qui est du mouvement populaire Grec, sa tonalité anti-Euro et même anti-Union européenne s’affirme chaque jour.

    Ces mouvements sont réputés «mettre en évidence la nécessité de décisions européennes fortes  » dans divers domaines. Mais depuis quand une « mise en évidence » à-t-elle produit des décisions politiques, surtout dans le cadre institutionnel européen tel qu’il existe ? On retrouve ici l’argumentaire du Parti Socialiste sur l’Europe sociale, que l’on appelle de tous ses voeux, mais sans se donner les moyens de la construire, et en particulier par des mesures unilatérales qui pourraient obliger nos partenaires à réagir. En fait, on se retranche derrière la prétendue nécessité de la « coopération européenne et mondiale » pour ne rien faire dans son propre pays, et l’on reprend les mêmes accents catastrophistes pour dénoncer les conséquences d’une action unilatérale qu’un Alain Minc ou quelques autres porte paroles stipendiés du camp du pouvoir et de l’argent.

    L’appel grandiose à la « coopération européenne et mondiale », appel que l’on a déjà évoqué, n’est ici que le cache-misère d’une impuissance politique fondamentale. Nous savons bien qu’il renvoie à une impossibilité. Il n’y aura pas de coopération entre les 27 pays de l’Union européenne si ce n’est autour du plus petit dénominateur commun qu’est la déréglementation dans le domaine des marchandises, des capitaux et des lois sociales. Un processus de coordination, fondé sur des politiques nationales, apparaît comme une perspective bien plus réaliste.

    Bref, tout se passe comme si ces membres du conseil scientifique d’ATTAC étaient assis sur une rente, celle de la contestation de l’ordre établi mais se refusaient soigneusement à prendre leur responsabilité pour tenter de construire un ordre meilleur. L’histoire jugera pareille posture.

    Aujourd’hui de plus en plus nombreux des femmes et des hommes politiques ont pris conscience de l’importance des enjeux et de la nécessité d’y apporter des réponses concrètes. Ségolène Royal et Arnaud Montebourg sont parmi les plus récents. Ils ne sont pas les seuls, et gageons qu’ils ne seront pas les derniers. La pâte lève ; l’histoire se remet en marche. Les auteurs du texte publié par Médiapart ont abdiqué l’ambition ou la volonté d’en être les acteurs. Ils finiront dans ses poubelles."

     

    3. L’heure de la démondialisation est venue, Par Bernard Cassen - Août 2011

    "(...) Les mots aussi doivent attendre leur heure… Et celle de la démondialisation semble venue…

    Si l’on en doutait, il suffit de voir la virulence des réactions que ce concept a suscitées dans des secteurs que l’on attendait (les libéraux de toute obédience), mais aussi dans d’autres que l’on n’attendait pas (certains altermondialistes d’Attac). La raison est la même dans les deux cas : dans la mesure où Arnaud Montebourg en a fait l’un des mots d’ordre de sa campagne des « primaires » du Parti socialiste en vue de la désignation de son candidat à l’Elysée, le thème de la démondialisation cesse d’être confiné aux débats au sein de la gauche critique pour s’installer dans le panorama électoral national et acquérir ainsi une légitimité et une « respectabilité » politiques dépassant le cercle des convaincus.

     On peut se demander si ce n’est pas la raison pour laquelle, dans une tribune publiée le 6 juin 2011 sur le site Médiapart et intitulée « Démondialisation et altermondialisme sont deux projets antagoniques », neuf membres du Conseil scientifique d’Attac - en fait les principales figures de la direction de l’association -, ont cru pouvoir affirmer, sur un ton polémique et sentencieux, que la démondialisation était « un concept superficiel et simpliste ». En n’hésitant pas, au passage, à mettre en scène la grosse – et scandaleuse - ficelle d’une prétendue convergence avec les thèses du Front national. (...)

    En théorie, deux solutions extrêmes sont possibles : ou bien « renationaliser » ces flux, afin qu’ils répondent à une volonté politique nationale exprimée par le suffrage universel - lorsqu’il existe -, ou bien élargir à la totalité de la planète l’espace public démocratique, afin d’exercer un contrôle effectif sur ce qui est déjà mondialisé. On voit bien qu’aucune de ces positions n’est tenable dans son intégralité. D’un côté, en effet, il existe nombre de domaines - ne serait-ce que celui de la lutte contre le changement climatique - qui échappent par nature au bornage des frontières, et, de l’autre, un gouvernement mondial doté de toutes les compétences d’un actuel exécutif national n’est pas envisageable à terme historique prévisible. C’est donc sur l’ensemble des solutions, extrêmes et intermédiaires, qu’il convient, au cas par cas, de jouer.

    Ces solutions intermédiaires peuvent prendre deux formes. On peut, à partir des Etats constitués, construire de l’international, c’est-à-dire mettre en commun, graduellement, des fragments de souverainetés nationales sur des questions faisant l’objet d’une délégation librement décidée, limitée, contrôlée - et révocable dans des conditions fixées à l’avance.

    L’autre terme de l’alternative consiste à faire évoluer les cadres étatiques vers des ensembles de souveraineté populaire plus vastes. Il ne faut cependant pas confondre cette idée avec celle de regroupements régionaux fondés sur le libre-échange et la « concurrence libre et non faussée ». Ce qui fait la différence, c’est l’existence ou non de mécanismes de régulation politique à fondements démocratiques, susceptibles de faire contrepoids au marché.

    L’Union européenne (UE), qui aurait théoriquement pu entrer dans cette catégorie, est au contraire un agent actif de la mondialisation libérale, une véritable machine à libéraliser. Donc un terrain majeur pour une contre-offensive démondialisatrice. (...)

    On objectera, non sans raison, que cela ferait entrer l’UE dans une zone de turbulences sans précédent, et dont les débouchés ne sont pas garantis à l’avance. Ce qui, en revanche, est garanti à l’avance en l’absence de correction de trajectoire à 180 degrés de la construction européenne, c’est l’austérité à perpétuité, l’explosion des inégalités et de la précarité, la dislocation accélérée du tissu social, la poussée de l’extrême-droite et de la xénophobie.

    Les libéraux n’ont aucun état d’âme à ce sujet et ils ont déjà fait leur choix, avec comme seul garde-fou la crainte de troubles sociaux majeurs. Par pusillanimité, par confusion mentale entre nation et nationalisme et par européisme béat, la majorité de la gauche social-démocrate et une partie de la gauche critique semblent bien parties pour faire le même, mais par défaut. Elles libèrent ainsi un vaste espace pour les forces qui refusent de se laisser enfermer dans le piège d’une alternance factice."

     

    Démondialisation : halte au feu !, Roger Martelli - juillet 2011

    "La toute-puissance des marchés et la mondialisation forment un tout inextricable. La "globalisation" concrète est l'effet d'une double universalisation : celle de la marchandise et celle de la finance. L'intuition de Marx, formulée en 1848, s'est réalisée : le capital est devenu monde. C'est sa force : partout, ses normes sont devenues des impératifs catégoriques, au point de laisser croire que l'histoire et finie. C'est sa faiblesse : ses limites et ses crises ne sont plus celles d'un pays ou d'un groupe de pays (les "maillons faibles") mais celle du système tout entier. (...)

    Dès lors, il devient dérisoire de disputer du lieu "premier". Si nous renonçons à faire du supranational un enjeu de citoyenneté, nous le laissons au libre jeu des puissances et des marchés financiers. Si nous négligeons les potentialités démocratiques persistantes du cadre national, nous perdons un moyen d'agir dans le monde. Le plus raisonnable est de s'appuyer sur la nation en subvertissant les cadres économiques, sociaux et institutionnels de son existence, tout en s'attachant à politiser démocratiquement les espaces supranationaux. (...)

    Ne nous divisons donc pas sur le subalterne. Ce que nous pouvons vouloir en commun, c'est libérer l'humaine condition des diktats des marchés, affirmer les mérites du partage contre ceux de la concurrence, prôner le bien commun contre l'esprit de lucre, la norme publique contre la norme marchande. Ce combat n'est pas celui d'un territoire, mais de tous. La nation n'est pas morte mais "l'inter-nations" ne suffit plus. Constituer le supranational en espace de politisation démocratique et en lieu de souveraineté : que nous le voulions ou non, que cela soit difficile ou non, nous sommes tenus d'y parvenir. Nous y mettrons le temps qu'il faut ; ne tardons pas à nous y atteler. Ensemble."

     

    Le débat se poursuit à gauche :  

    - La démondialisation en question,  Débat Michel Husson/Jacques Sapir dans La Revue des Livres - Septembre 2011 

    - Pour quelle planète ? Jeanne Portal, Thierry Brun, dans Politis - 7 juillet 2011

    La démondialisation heureuse ? Jean-Marie Harribey, 16 juin 2011

    - Les impasses de la démondialisation. Réponse à quelques contradicteurs, Pierre Khalfa - Juin 2011

     

     

     

     

     


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